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« Un message fort à la France et à l’Europe »
Maire de Rixheim, vice-président délégué de la M2A (Mulhouse Alsace agglomération), Olivier Becht, qui a participé aux négociations pour le conseil unique, estime urgent de revenir à l’essentiel. À savoir le projet pour l’Alsace.
Comment expliquez-vous qu’un projet qui faisait consensus ne déclenche pas l’enthousiasme ?
Pendant tout le temps où les élus ont construit l’architecture de la nouvelle collectivité, on a énormément parlé d’institutionnel. Les enjeux principaux ont été brouillés par les difficultés de dialogue entre les trois présidents. Or l’essentiel n’est pas là. Même si la question institutionnelle va dans le sens de l’histoire, car on supprime une strate et on regroupe les compétences. Cela a du sens. Mais l’enjeu principal est de savoir ce que va devenir l’Alsace dans le prochain quart de siècle. On a eu la chance, pendant quarante ans, de vivre au cœur de l’Europe. Depuis dix ans, avec la mondialisation et l’élargissement de l’Europe vers l’Est, l’Alsace a décroché de manière assez violente.
« Nous pouvons devenir la Silicon Valley de l’Europe »
Par rapport à l’Allemagne et à la Suisse ?
Pas seulement. Alors que notre taux de chômage était proche de celui de nos voisins, il est aujourd’hui de plus du double. Mais nous avons décroché aussi par rapport aux autres régions françaises. Nous sommes sur une pente descendante plutôt qu’ascendante. Nos concitoyens s’en rendent comptent. Il y a les fermetures d’entreprises, nous avons perdu 400 emplois à Rixheim, 1 500 intérimaires chez Peugeot, deux fois Florange. Beaucoup de jeunes talents partent à Paris, à Londres, au Canada, avec le sentiment que c’est mieux ailleurs. En Alsace, on vit sur les lauriers du passé, alors que nous sommes entraînés dans une compétition des territoires européenne et mondiale.
Votre proposition ?
Soit on se donne les moyens de retrouver notre place, et on peut y arriver, soit on s’installe durablement sur la pente du déclin. Nous pouvons devenir la Silicon Valley de l’Europe, mais nous pouvons aussi devenir une région sinistrée.
En quoi cet enjeu est-il lié à la réforme institutionnelle ?
Le conseil unique est un signal. Il signifie que nous, Alsaciens, avons repris notre destin en main. Nous nous donnons les moyens pour être plus performants et pour innover. En regroupant les énergies, on est plus fort. Et les transferts de compétences peuvent être un vrai levier pour le dynamisme économique.
Un exemple de transfert ?
En matière de coopération transfrontalière. Si on accroît notre pouvoir de négocier avec les Allemands et les Suisses, sans passer par Paris, nous pourrons nous raccrocher à leur dynamisme, en créant par exemple Rheinport, avec Bâle, Weil et Mulhouse-Rhin. On deviendrait le 2e port fluvial d’Europe. Ce serait une carte de visite extraordinaire ! En matière d’emplois aussi, alors que dans le Bade-Wurtemberg 15 000 entreprises seront sans repreneur dans les dix ans à venir, il sera plus facile de se parler, de connaître les emplois disponibles et les formations à mettre en place pour y accéder. Mais, contrairement à ce que prétendent certains, le droit du travail restera inscrit dans le cadre national.
On parle de compétences en matière de bilinguisme…
Des jacobins y voient des relents d’autonomisme. C’est une réalité locale. Pour travailler avec nos voisins, il faut parler allemand. Et cette pratique a baissé de manière dramatique. Il faut d’autres méthodes, plus d’heures, plus d’oral. C’est impératif pour l’allemand, mais aussi pour l’anglais. Nous devons former des jeunes parfaitement trilingues, la collectivité unique peut le réussir. Elle pourra aussi porter, de manière plus efficace, un fonds d’investissements pour les PME-PMI, à l’image d’Alsace Croissance, mais avec des moyens démultipliés. La collectivité unique sera aussi mieux à même de lancer un débat sur l’autosuffisance énergétique – chiche ? –, de mettre en place un grand plan numérique qui ne laisse de côté ni les vallées, ni les zones rurales…
On joue notre survie. Ce n’est pas la question de savoir où sera le siège, ni qui sera le président de l’exécutif ou celui de l’assemblée. Tout cela est accessoire. Le schéma est simple : de trois collectivités, on en fera une seule, avec un directeur et un budget. On fera forcément des économies. On se donne les outils. Pour le reste, il y aura des élections en 2015 qui permettront aux Alsaciens de choisir leur majorité.
« Si le non l’emporte, on aura l’image d’une Alsace sclérosée »
Serez-vous candidat ?
Je n’ai jamais travaillé en vue de me présenter à une élection. Si j’ai proposé de servir de médiateur entre Philipe Richert, Charles Buttner et Guy-Dominique Kennel, à un moment où tout paraissait bloqué, c’est parce que je croyais en ce projet. J’aime cette région et j’ai fait le choix d’y rester à ma sortie de l’Ena. Ce territoire mérite qu’on se batte pour lui… En 2014, j’espère être réélu maire de Rixheim, et je suis aussi suppléant d’Arlette Grosskost.
L’exemple de la M2A ne plaide pas pour la fusion…
En 2009, la M2A a été créée à partir de trois communautés de communes, élues en 2008. L’année prochaine, le nombre d’élus sera divisé par deux, celui des vice-présidents par cinq. Les communes n’ont rien perdu, mais l’agglomération a été gagnante. C’est la même chose avec le conseil d’Alsace. Aucun territoire ne sera perdant. Mais c’est l’Alsace qui gagne.
Et si le non l’emporte ?
Autant le oui sera un message fort à la France et à l’Europe, autant le non serait catastrophique dans la compétition des territoires. Ce serait l’image d’une Alsace sclérosée, ankylosée par ses querelles entre le Haut-rhin et le Bas-Rhin, qui n’aurait rien compris aux enjeux, au moment où la compétition se joue avec des régions en Chine et au Brésil. Il n’y aura pas de seconde chance… au tirage !
le 03/03/2013 à 05:00 par Propos recueillis par Yolande Baldeweck
Un autre partisan du "oui" mais pas franchement avec les mêmes idées derrière la tête:
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Alsace d’abord : pour un « oui franc et massif, sans restriction »
Alsace d’abord fera campagne pour le oui au référendum du 7 avril sur la fusion des trois collectivités alsaciennes.
« Unis face à Paris » , clame le parti régionaliste sur une affiche tirée à 5 000 exemplaires, flanquée d’un pouce levé. Les collages ont commencé à Colmar et Alsace d’abord concentrera ses réunions sur le Haut-Rhin « où les 25 % des inscrits seront les plus difficiles à obtenir » , estime Jacques Cordonnier, le président du mouvement.
« Alsace d’abord s’adresse à tous ceux qui s’apprêtent à aller à la pêche, et ils sont nombreux », détaille l’ancien conseiller régional, qui trouve la majorité alsacienne « très optimiste » et craint « un vote sanction contre les trois présidents de collectivités ».
« Devenir crédible » face aux voisins
« Il ne faut pas se tromper de vote » , martèle Jacques Cordonnier, pour qui Alsace d’abord a « toujours porté ce projet depuis sa création en 1989 ». Certes, le projet actuel n’est pas exempt de reproche à ses yeux : « Une usine à gaz, jusqu’au nom de collectivité territoriale d’Alsace. Difficile de faire plus technocratique… »
C’est malgré tout « mieux que rien » , se console Jacques Cordonnier, qui milite pour « un oui franc et massif, sans aucune réserve ». Tout tient dans le slogan, volontairement polémique : « L’Alsace sera beaucoup plus forte face à Paris pour obtenir des transferts de compétences et de ressources. Et les attaques qui se multiplient contre le droit local sont autant d’arguments en faveur du oui. »
Pour le président d’Alsace d’abord, il s’agit aussi de « devenir crédible » , face aux voisins suisses et allemands, et de faire des économies, « surtout dans l’efficacité des décisions prises ». Jacques Cordonnier prend enfin le contre-pied de ceux qui agitent le spectre du « centralisme strasbourgeois » : « Le meilleur contrepoids à Strasbourg, c’est justement le conseil d’Alsace ! »
En cas de victoire du oui le 7 avril, il déplore simplement « que les parlementaires alsaciens ne portent pas eux-mêmes une proposition de loi ». Et se plaît à rêver que les juristes du cru se saisissent du sujet.
le 03/03/2013 à 05:00 par Clément Tonnot