Dna du 31 05 2013
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Thann Comité Local d’Animation de la ligne Mulhouse-Thann-Kruth« Se mettre à la place de l’usager ».
Le Comité Local d’Animation de la Ligne Mulhouse-Thann-Kruth (CLAL) s’est réuni mardi soir en présence des représentants de Réseau Ferré de France (RFF), de la SNCF et de la Région, présidé par J-Paul Omeyer, vice-président du conseil régional. Si tous voient des améliorations dans le fonctionnement de la ligne, les associations d’usagers n’arrivent pas aux mêmes conclusions.
Il aura fallu ingurgiter beaucoup de chiffres, ce soir-là, pour digérer le bilan de la ligne Mulhouse-Thann-Kruth effectué par Paulo Oliveira, responsable de la ligne tram-train pour la SNCF qui annonce de « bons résultats pour le contexte général de la deuxième année de fonctionnement du tram-train Mulhouse-Vallée de la Thur » et notamment « la consolidation des résultats obtenus en 2011 en régularité, une organisation plus efficiente et une meilleure fiabilité du matériel roulant ; et ce malgré certains sujets qui restent sensibles comme la qualité de l’information en situation perturbée inopinée, les actes de vandalisme, l’incivilité en bord et les traversées de voix (notamment à Cernay et Dornach) ».
Evolution du trafic sur la ligne
Parmi la petite cinquantaine de personnes présentes dont notamment beaucoup d’élus de la haute vallée, premières réactions d’usagers : « le tram-train fait plus de bruit que les MP3 des jeunes passagers » ; « l’insécurité règne car les contrôleurs ne surveillent pas correctement » ; « les conducteurs devraient montrer l’exemple et eux-mêmes ne pas fumer sur les quais voire en cabine »…
Concernant le trafic sur la ligne, le bilan de la SNCF effectué depuis 2002 (720 000 voyages) est en progression en nombre de voyages , malgré un léger recul en 2010 (852 000 voyages), « année où la ligne a été fermée pour travaux avant la mise en service du tram-train », rappelle Paulo Oliveira qui précise que les chiffres de 2011 (996 000 voyages) et 2012 (1,082 M de voyages) ne tiennent pas compte des voyages intra PTU (périmètre des transports urbains).
Entre 2011 et 2012, les abonnements « fer sec » ont augmenté de 7 % et les abonnements « Attitudes », de 31,1 %, soit une augmentation globale de 10 %, l’évolution de la moyenne régionale n’étant que de 5 %. À noter que les voyages de la vallée vers le PTU sont en augmentation de 9,7 % et représentent plus de 71 % des voyages effectués sur la ligne. De plus, les montées descentes voyageurs par jour montrent que le tram-train est préféré au TER…
« Pris en otage »
Pour les usagers, c’est une évidence : « on est pris en otage, à cause des horaires, on ne peut pas faire autrement que de prendre le tram-train ». Sans parler du prix de l’essence qui augmente. Et les usagers du haut de la vallée repartent à l’assaut en pointant du doigt que même si globalement le trafic sur la ligne augmente (+31% de la vallée vers le PTU), les voyageurs du haut de la vallée se détournent du train, puisqu’entre 2011 et 2012, les voyages entre la zone D (com com de St-Amarin) vers le PTU ont diminué de 7,7 %.
Pour Carole Bernardy, chargée de mission transport à la Région, il s’agit d’une « inflexion nationale du niveau du trafic due à la crise et à l’image du service public ».
Et François Tacquard, le président de la com com de Saint-Amarin de noter qu’il aurait été plus judicieux de créer « une zone à partir de Thann, où se fait la rupture de charge entre le tram-train et le train, plutôt que des zones par com com », car du coup, « on n’a pas de statistiques précis en amont de Thann ».
Selon l’élu, la diminution de 1,7 % du trafic entre la zone cernéenne et la zone “haut de vallée” est due à l’augmentation du temps de trajet du fait des nombreux arrêts du tram-train. François Tacquard rappelle que « la com com de St-Amarin a lancé une étude avec l’association TET mais on attendait les derniers chiffres de la Région pour la finaliser ; et ces chiffres sont plus graves que ce que l’on pensait ».
« Un échec dans la vallée »
Jean-Paul Omeyer s’insurge : « je ne peux pas laisser dire cela, le nombre total est en forte augmentation ; et concernant cette étude, la moindre des politesses aurait été qu’on me sollicite en tant que président du CLAL ! »
Pour Jean-Jacques Weber, conseiller général de St-Amarin, c’est l’arrêt Thann/Saint-Jacques qui pose problème et qu’il faudrait « supprimer, car il est l’une des causes de la désaffection pour le train et que dans la vallée, le tram-train est un échec ». Mais le maire de Thann rappelle que cet arrêt dessert le lycée...
Concernant le taux de régularité des trains à 5 minutes (c’est-à-dire moins de 5 min de retard à l’arrivée, par rapport à l’heure prévue ; la ponctualité étant calculée sur l’heure de départ), il est de 97,44 % pour 2012 et le taux de trains supprimés, de 0,85 %.
Ces chiffres ont évidemment soulevé une levée de boucliers des usagers, chiffres à l’appui, puisqu’un membre de l’association Adul-KM a effectué de mars 2012 à mai 2013, des relevés sur son train du matin au départ de Bitschwiller et le soir au départ de Mulhouse. Il a dénombré entre 5 et 12 « incidents » par mois…
Jean-Paul Omeyer regrette, lui, surtout qu’il n’y ait pas de transparence : « que ce soit un sanglier, un accident au Gehren ou un moteur grillé, ça arrive…»
Mais le proviseur du lycée de Cernay, Pierre Fuchs enfonce le clou, lui qui bénéficie d’une information en temps réel puisqu’il reçoit des messages sur son téléphone en cas de retard ou de suppression de train : depuis le début de l’année, il regrette avoir déjà reçu une centaine de messages… « Et ce n’est pas facile de gérer la vie d’un lycée quand cent élèves manquent ou sont en retard… De plus, on suscite indirectement les incivilités » car les jeunes, oisifs en attendant le train vont finir par dégrader ou mettre leur MP3 à fond…
Pour Paulo Oliveira, même si pour des cas particuliers les solutions sont gênantes, « ce sont des solutions globales qui sont bonnes globalement ». Et RFF de confirmer qu’au niveau matériel la ligne ne pose pas de problème particulier…
Courir comme un lapin
Mais dans le public, on s’insurge : « un jour où le train était en retard, je discutais avec un homme qui racontait que son patron lui avait dit qu’il avait déjà été en retard deux fois et qu’à la troisième, il serait licencié… J’ai vu cet homme d’une cinquantaine d’années courir comme un lapin à l’arrivée du train… Comme un lapin, pour ne pas être viré ! »
Et ce sont les mêmes arguments quand la SNCF annonce des suppressions de trains en été : « il y a des gens qui travaillent en juillet-août… Pourquoi supprimez-vous toujours les mêmes trains ? Ça nous oblige à nous débrouiller autrement. Vous faites des économies, je comprends, mais vous ne nous faites pas un rabais sur l’abonnement » ; «Nous, on paie le train et la voiture ! Vous ne vous mettez pas à la place de l’usager. » Et un autre de conclure : « Vous vous dites juste “je suis le service public, soyez déjà contents d’être transportés.” »