En gros, les problèmes ne seront jamais terminés...
Quatre bougies sous la grande verrière
La nouvelle gare multimodale de Strasbourg, dédiée à la grande vitesse, est entrée en service en juin 2007. L’extension magistrale du bâtiment historique a été ternie depuis par de vilains problèmes de ruissellements. Quatre ans après, on sort doucement la tête de l’eau.
Le 10 juin 2007 le TGV faisait son entrée en gare de Strasbourg. Une gare dont le bâtiment historique de 1883 s’est vu flanqué en façade d’une verrière moderne. Cette dernière est la partie émergée du pôle multimodal qui se poursuit en sous-sol jusqu’à la station de tramway.
L’œuvre de l’architecte Jean-Marie Duthilleul a fait débat. Mais à part les amateurs forcenés de néo-Renaissance, aucun Strasbourgeois ne rendrait aujourd’hui les 2 000 m² de hall couvert, ni la liaison à grande vitesse avec Paris. D’ailleurs, stricto sensu, la figure de verre et d’acier s’est montrée sans faille. Le talon d’Achille du dispositif étant plutôt dans la manière dont il reçoit l’eau de ruissellement.
Les témoins de l’affaire ne sont pas près d’oublier les orages violents des 29 et 31 mai 2008. Depuis les toits du bâtiment historique des trombes d’eau s’étaient déversées sous la verrière (qui n’est pas jointive avec la façade de la gare), et avaient dévalé les escalators pour finir dans la station de tram, en passant par les boutiques du niveau moins un. Les écoulements d’eaux usées de la place de la gare avaient été rapidement saturés, créant une piscine en pente douce qui s’était déversée par les portes d’entrées de la verrière, et encore vers le sous-sol.
Le rapport d’expertise sur cet incident majeur, qui avait nécessité l’évacuation temporaire de la gare, n’est toujours pas disponible. Il s’orienterait vers une non-responsabilité des constructeurs, du fait du caractère exceptionnel des pluies.
Trottoir rehaussé
« Mais nous avons œuvré pour ne plus avoir cette ampleur de dégâts », indique François Henry, directeur Gares et Connexions pour le Grand Est, à la SNCF. Cette dernière a fait sauter des bouchons sur les chéneaux du toit. La Communauté urbaine a, de son côté, rehaussé de plus ieurs centimètres les trottoirs de plain-pied entre la place et la gare.
Plus vicieux, les problèmes d’infiltration d’eaux de ruissellement en sous-sol devaient être réglés avec les finitions du chantier. La station de tram, la galerie commerciale au niveau moins un, également gérée par la CTS, en bavent toujours aujourd’hui (lire également ci-dessous).
Après divers sondages sur la place, « on a pu traiter une partie du sujet à moindres frais », explique Alain Giesi, directeur études et projets à la CTS. Le rétablissement d’écoulements plus performants sur l’esplanade permet de patienter en attendant le rapport d’un deuxième expert mandaté en 2008 après un recours contentieux de la CTS sur cette question. Il doit déterminer les causes et les responsabilités de ces dysfonctionnements.
Alain Giesi raconte : « Nous avons eu une dizaine de réunions contradictoires à plus de 50 personnes.» Le nombre d’entreprises impliquées, l’imbrication complexe des deux établissements recevant du public (la gare et sa verrière d’un côté, la station de tram de l’autre) avec la place qui y mène, font de ce dossier d’assurances un véritable cas d’école.
Sécurité incendie conforme
« La difficulté est que chaque intervention d’urgence a demandé l’avis de toutes les parties », reprend Alain Giesi. Quant aux reprises d’étanchéité finales, à la réfection des circuits électriques endommagés et à la remise à neuf des plafonds, murs et sols qui ont souffert depuis quatre ans dans la station de tram et la petite galerie commerciale, elles ne pourront avoir lieu qu’avec le bouclage du contentieux…
Il serait faux, cependant, de dire que tout patauge sous la verrière. La sécurité incendie a été jugée conforme, notamment après un exercice d’évacuation des fumées en 2008. « Et, la semaine dernière, la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité a levé ses dernières réserves », nous indiquait hier l’adjoint du quartier Jean-Jacques Gsell !
« Ce genre de dossier est complexe et on n’y badine avec aucun détail », rappelle l’élu. De son côté, François Henry précise que l’autorisation d’ouverture au public peut être donnée par le préfet indépendamment de l’avis de la commission. Ce qui a donc été le cas durant quatre ans, avec le passage de 60 000 personnes par jour sur les lieux.
Reste un dernier obstacle à lever : « Jusqu’ici, nous n’avons le droit d’organiser de manifestations, sous la verrière, que de manière très dérogatoire, la capacité des portes à évacuer le public en cas de problème étant jugée trop restreinte », déplore François Henry. Le directeur a fait le point avec les services de sécurité pour faire sauter ce dernier verrou : « Mon argument est qu’une exposition ou une animation dans ce bel espace peut raisonnablement être considérée comme ne drainant que le public habituel de la gare, et donc pas un surplus de personnes.»
Les discussions ayant abouti, la SNCF proposera quatre jours de concours et de concerts à l’occasion de la fête de la musique… Pour commencer.
« Nous sommes preneurs aussi, à la Ville, tout comme à l’Office du tourisme, de pouvoir occuper les lieux de temps à autre , renchérit Jean-Jacques Gsell. Ce serait un juste retour pour la participation de la collectivité à hauteur de 180 000 € aux frais d’entretien du hall .»
MSK
http://www.dna.fr/fr/strasbourg/info/52 ... e-verriere
Galerie commerciale avec handicaps
La galerie du niveau -1 est l’endroit le plus boudé par les clients potentiels.
Ce jour de juin, devant la boutique de petite restauration « Les Délices Gourmands » trois seaux recueillent une eau indésirable qui ne cesse de goutter du plafond. « Rien n’a changé depuis le début, commente, fatigué, un des commerçants de la galerie. Dès qu’il pleut, on a droit aux infiltrations, et en permanence on a toujours de la poussière, ce qui n’est pas vraiment compatible avec un commerce alimentaire.»
Du mieux pour la poussière
La CTS, qui est gestionnaire de ce niveau moins un et de la station de tramway, considère que le chapitre des poussières est clos depuis 2009. De fait, le sable de freinage que projettent les rames sur la voie est désormais plaqué au sol par des brumisateurs. Une intensification du nettoyage des voies complète le dispositif. Et si des poussières perdurent, elles peuvent provenir aussi bien du trafic automobile. Il est vrai que le parking voitures de la gare est voisin…
Le sujet des infiltrations est suspendu, quant à lui, au contentieux global : « On a amélioré des écoulements de manière provisoire, mais on est tributaires de l’expertise en cours avant de pouvoir agir réellement et durablement », explique le directeur commercial de la CTS Jean Terrier. La CTS est d’ailleurs la première touchée par ces problèmes, puisque sa boutique située dans la galerie a eu des cloisons et des faux plafonds régulièrement imbibés. Elle est aujourd’hui fermée : « Oui, partiellement à cause de ces infiltrations mais aussi parce que la fréquentation de la boutique nous a incités à redéployer le personnel vers l’espace de vente Homme-de-Fer », insiste Jean Terrier.
Du côté des petits commerces, une grogne sourde s’est installée contre ce bailleur dont on a l’impression qu’il ne fait rien, laissant chacun trouver son mode de fonctionnement.
A l’Instant Plaisir , le nettoyage intensif des présentoirs, tables et sols, plus important que pour un autre local du même type, est entré dans un « protocole non négociable pour mes salariés », indique le patron Ramdane Koussa. Qui a lancé aussi une offre café-croissant à un euro jusqu’à 9 h. Shahem Gazi, qui tient la Boutique du Voyageur, a renoncé à vendre certains produits. « Mon local est trop chaud à cause des réfrigérateurs qui tournent et d’une aération impossible : je n’arrivais pas à garder des fruits vendables plus d’une nuit.»
Moins passant que prévu
Par ailleurs, la galerie est un peu maudite du point de vue du flux de chalands. Au moment de la commercialisation des espaces, il était question de 13 000 passages par jour dans la galerie, notamment en provenance de la station de tram. A l’usage, le public préfère souvent l’accès direct au niveau zéro, sous la verrière, qui est plus court. Et l’arrivée du tram en surface (nouvelle ligne C) a encore accentué l’isolement de la galerie commerciale.
A la CTS, on met en avant une écoute et des efforts pour les locataires des boutiques. « Nous avons signé une charte, fin 2008 — début 2009, avec les commerçants, dans l’objectif de donner un petit coup de loupe sur ce qui se passe au niveau moins un, précise Alain Terrier. On en a profité pour remettre un peu de couleur, là en-bas.»
En l’occurrence, des piliers ont été habillés de vert, de jaune, munis pour certains de mange-debout, et l’éclairage a été renforcé pour éviter un rédhibitoire effet de grotte. La signalétique a repris les couleurs vitaminées déclinées en bas, notamment au niveau zéro, sur les vitres des ascenseurs. « Mais il n’est pas possible de multiplier ces affichages dans la gare », indique-t-on encore à la CTS.
Les difficultés économiques pour certains, pour d’autres le fait de devoir se bouger plus que les boutiques « privilégiées » du niveau zéro pour réaliser son chiffre, usent les patiences. Un des gérants de la galerie commerciale nous a indiqué qu’à sa connaissance, chacun d’entre eux a pris un avocat, désormais, pour relayer ses doléances au bailleur.
La CTS reconnaît certaines tensions, et même des fâcheries qui finissent par produire du retard de payement de loyers. Dernier incident en date : La Boutique du Voyageur a dû démonter une climatisation qui n’était pas posée dans les règles de l’art. En attendant de trouver une solution valable, le patron continue donc de fondre, avec une partie de ses friandises chocolatées, dès que le soleil donne sur la verrière, dans les hauteurs…
MSK
http://www.dna.fr/fr/strasbourg/info/52 ... -handicaps 
)